EFFEUILLER LES JOURS
Depuis des années maintenant,
je peins mes premiers cafés du matin.
D’abord dessinés dans des livres de poésie
tel une gamme du musicien,
ils me mettaient en doigt.
Suite à des problèmes physiques,
ils sont devenus résilience,
puis,
sortant des livres,
ils devinrent mon seul travail.
Ma vie réduite à son intime, je me suis concentrée sur ce geste quotidien.
Plus j’avance sur ce chemin,
plus je me sens me rapprocher
du geste des moines à leur table,
qui,
par le doré et quelques couleurs,
venaient enluminer les écrits des autres.
Un geste qui se répète,
jour après jour,
et qui pourtant, est à chaque fois différent.
Le choix de la tasse du jour, l’atmosphère du temps, mon jardin
et bien sûr mon humeur,
influencent le trait de mon travail.
Celui-ci me permet d’entrer au plus profond de moi
pour y trouver cet havre du beau,
de la liberté et l’errance
qui me sont salutaires.
La question est là, jour après jour:
« L’intime peut-il toucher à l’universel? »
Effeuiller les jours, les dorer, simplement.